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Les travailleuses fantômes


Laurent

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Ohana nous livre sa dernièr chronique, à lire en page d'accueil ou ici :

http://www.immigrer.com/chroniques/Les-tra...s-fantomes.html

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Ohana,

Inciter les filles à aller vers un métier masculin n'est pas, à mes yeux, une dévalorisation du métier féminin. C'est aussi les inciter à oser y aller et montrer qu'elles sont capables tout autant que nous à faire tel ou tel métier. Il faut aussi des incitations telles que celles-là pour faire changer les mentalités. Il suffit de prendre les métiers des services à la personne. Tout le monde trouvera normal de voir des femmes occuper ce type de poste, par contre cela paraîtra louche de voir un homme dans la place. Un homme qui fait un métier de femme est louche et il sera forcément homosexuel, surtout si c'est pour tenir un intérieur, faire le ménage, le repassage ! Dans le même ordre d'idée, une femme avec un enfant dans un parc est banal alors que la présence d'un homme avec son gamin sera touchant, craquant, adorable mais absolument pas banal.

Il faut qu'elles se fassent violence, et pas de manière symbolique. C'est nous qui mettons les fonctions de domestiques ou gardiennages à un si bas niveau dans l'échelle du travail (tout comme le personnel administratif est dans la case "improductif") car cela ne fait référence qu'au servage, à l'esclavagisme. Ce qui est étonnant ce sont (ou seraient car je n'ai pas réussi à retrouver cette trace) les études pour intégrer le travail de la femme au foyer dans le calcul du PIB en tant que secteur productif invisible. Alors est-ce que cela serait la voie pour une rémunération de la mère de famille en tant que travailleuse ?

Ces travailleuses fantômes ont une place dans la société, elles sont indispensables aux familles qui les emploient, aux sociétés qui les embauchent. Combien de femmes devraient renoncer à leur carrière si ces "fantômes" n'existaient pas ? Oui les femmes car il est bien connu que dans un couple, elles seront les premières à être sacrifié ou se sacrifier pour le bien-être des enfants. Pourquoi ces femmes qui travaillent et qui ont un "fantôme" à la maison ne donnent pas à ces dernières la place qu'elles méritent ? Ne serait-ce pas simplement pour se valoriser, un peu comme cette manie de vouloir mettre à tout prix sur sa carte de visite un titre à responsabilité ? Donner à ces fantômes une réelle place signifierait qu'elles font un boulot aussi important que les "executive woman" qui les emploient. Faut pas rêver , elles ne font que le ménage ....

Avant de combattre les préjugés d'une société masculine, elles devront affronter la vision qu'elles ont de leur propre travail et donc affronter le regard qu'elles ont sur leur mère. On devra arrête de considérer que certains jobs sont dévalorisants. Tous sont utiles, depuis le balayeur de rue jusqu'au patron d'industrie. Mais il faut croire que plus on a de richesse moins on voit le monde qui nous entoure !!

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Bonjour Tohonu,

Inciter les filles à aller vers un métier masculin n'est pas, à mes yeux, une dévalorisation du métier féminin. C'est aussi les inciter à oser y aller et montrer qu'elles sont capables tout autant que nous à faire tel ou tel métier. Il faut aussi des incitations telles que celles-là pour faire changer les mentalités.

Ce n'est pas tant d'inciter les femmes à oser ou à s'expérimenter hors des filières de formation et des professions traditionnellement féminines que je remets en question que la direction ainsi que la manière préconisées dans les mesures incitatives mises en place. En d'autres termes, qu'une femme ose explorer "ailleurs" : bravo. Mais la lecture que je fais des mesures incitatives est plutôt : madame, mademoiselle, explorez dans des directions précises (traduction : formations et professions traditionnellement masculines) et osez de manière tout aussi précise (traduction : soyez entreprenantes, affirmées, ayez le sens de l'initiative, de l'ambition, etc - c'est-à-dire des qualités socialement considérées comme étant surtout masculines).

Ainsi, ce n'est pas tant un changement des mentalités auquel on assiste - ou alors, seulement dans la forme - mais bien plus à la consolidation d'une mentalité sur le fond qui est celle du maintien de la prédominance d'un modèle masculinisant. Ce qui est, finalement, un jeu social auquel la femme est perdante d'avance car en restant la femme "classique", elle maintient l'inégalité sexuelle et en devenant une femme "superwoman", elle confirme implicitement la supériorité du modèle masculin. Il reste l'entre-deux, la recherche de l'équilibre, l'éternel compromis qui est - soit dit en passant - une qualité considérée socialement féminine ...

Bref, je maintiens mon idée : non seulement les mesures incitatives actuelles, loin de contribuer significativement à résoudre le problème des inégalités sexuelles, les renforçent mais en plus, par leur existence même, ces mesures rendent ces inégalités encore moins évidentes. Car, en effet, les femmes peuvent dire aujourd'hui qu'elles sont plus scolarisées, sont très insérées sur le marché du travail et obtiennent même des postes à très hautes responsabilités (pensons à Monique Leroux au Mouvement Desjardins ou encore à Hélène Baril à la tête de Rio Tinto Alcan). Toutes ces victoires permettant ainsi de mieux dissimuler encore les inégalités socio-culturelles bien tenaces : une des rares femmes cardiologues du Québec je crois partageait il y a quelques années dans une interview que lorsque son enfant est malade, c'est toujours elle que l'école appelle en premier !

Là où je partage entièrement ton point de vue, c'est que le mouvement féministe (prenons-le au sens large en tant que phénomène social visant l'émancipation de la femme) doit aussi regarder le propre rapport qu'il a développé sur la femme que celui que la société a historiquement construit sur elle. De mon point de vue, je trouve en effet parfaitement incohérent qu'une femme se disant féministe d'un côté puisse, de l'autre côté, accorder encore beaucoup d'importance à reproduire un rôle social classique (se maquiller de façon à bien révéler "sa féminité", tenir à ce que l'homme lui ouvre la porte).

- O'Hana -

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(traduction : soyez entreprenantes, affirmées, ayez le sens de l'initiative, de l'ambition, etc - c'est-à-dire des qualités socialement considérées comme étant surtout masculines).

salut,

Je ne sais si l'ambition ou l'initiative est masculine mais lorsque je vois mon entourage, les femmes sont plus prompt à donner un coup de pied dans la fourmilière que les mecs. Elles n'ont pas peur de l'affrontement ... qui est pourtant réputé masculin! Dommage que soit rajouté par la suite "elle en a .." ce qui laisse tout dire de ce que l'on pense d'elles: au pouvoir elles n'ont plus rien de féminin. Et cela traduit bien ce que tu écris.

De mon point de vue, je trouve en effet parfaitement incohérent qu'une femme se disant féministe d'un côté puisse, de l'autre côté, accorder encore beaucoup d'importance à reproduire un rôle social classique (se maquiller de façon à bien révéler "sa féminité", tenir à ce que l'homme lui ouvre la porte).

Pour montrer sa différence, montrer qu'elle peut-être différente de l'image d'une Maggi ou de l'image qui était accolée aux féministes pures et dures (pas féminines, certainement lesbiennes ...).

Et ouvrir une porte à une femme, cela peut aussi se traduire par: j'ai le pouvoir de faire ce que je veux d'un homme. On n'est plus dans le registre de la galanterie mais de la domination là. Tout comme ce que représente le maquillage (tu crois que l'on peut utiliser le terme: la symbolique ? ), proche cousin du tatouage, qui indique une place dans la société et un certain mystère ... uniquement pour toucher l'homme où cela le fait mal car il est bien connu que le modèle masculin a un morceau de cerveau dans la tête et l'autre sous la ceinture.

Ces deux traits de caractères un peu grossier ne traduisent qu'une seule même idée: la femme peut dominer l'homme .. en le laissant coire qu'il commande. Ce n'est pas associé au féminisme cela ?

Bye

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