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Mois du patrimoine asiatique au Québec/Canada


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Je me souviens

Chaque année, en mai, le Mois du patrimoine asiatique au Québec et au Canada est un moment important pour rendre hommage aux communautés asiatiques d’ici, mais aussi l’occasion de constater la place dérisoire que leur fait l’histoire officielle. Plus d’un siècle est passé depuis l’arrivée des premiers Asiatiques au Québec et nos représentations de ces communautés continuent de se réduire à la gastronomie, aux arts martiaux ou aux dépanneurs. Pas un vilain départ, mais dans un contexte où les débats sur l’immigration et l’inclusion sont à l’avant-plan, la place accordée à la contribution des Asiatiques à la société doit être améliorée. Il y a de ces personnes dont la trajectoire au Québec et au Canada acquiert une dimension universelle qui mérite d’être racontée.

 

Jennie Wong

 

« Criminels », « voleurs de jobs », « Chintok » : c’est avec ces insultes que le père de Jennie Wong fut accueilli au Canada en 1911. La loi obligeait alors les Chinois à payer 500 $ pour immigrer ici. Ensuite, la crainte du « péril jaune » conduisit le Canada à adopter la Loi sur l’exclusion des Chinois, qui a carrément interdit leur immigration entre 1928 et 1947. Jennie Wong est née à Vancouver à cette époque, alors que les Chinois faisaient face à du racisme institutionnel. L’année suivant l’abolition de la loi, elle est devenue la première femme DJ de l’histoire du Canada. Son parcours rappelle celui des pionnières racisées qui ont ouvert la voie aux générations suivantes, dont la mienne.

 

À la même époque, l’administration municipale de Montréal avait aussi suivi le mouvement du profilage racial en imposant une taxe annuelle de 50 $ aux buanderies, qui constituaient le commerce principal de la communauté chinoise. Lorsque la plupart des buandiers chinois refusèrent de payer cette taxe, plusieurs furent envoyés en prison. Il fallut attendre un siècle avant que le Canada, en 2006, présente ses excuses officielles aux familles chinoises comme celle de Jennie Wong.

 

Ying Chen

 

Immigrer dans un nouveau pays est un acte de courage. On le reconnaît encore trop peu. On met derrière soi les rues de notre enfance, nos premières amours et tout ce qui forme nos repères les plus intimes et viscéraux. En 1989, juste avant le massacre de Tiananmen, la romancière Ying Chen choisit Montréal. Son écriture sera à tout jamais marquée par une tension entre sa nostalgie du pays natal et son désir d’être définie autrement que par ses origines. Dans son roman dédié à son fils, La lenteur des montagnes, elle met en question cette tendance quasi spontanée des personnes de la société d’accueil de faire de son lieu de naissance « quelque chose de prédominant, où chacune de [ses] actions est interprétée sous l’angle de la “culture”, voire de la “race”, où [ses] livres sont souvent interprétés comme essentiellement “chinois”, où l’on nie [son] individualité ».

 

Déchirés entre la recherche de racines lointaines et le besoin d’appartenir au territoire québécois, les jeunes issus de l’immigration construisent leur identité à tâtons. Chez moi, comme pour ces milliers d’enfants de la loi 101 qui vivent quotidiennement dans leur langue seconde, nous n’avons gardé qu’un contact rudimentaire avec notre langue maternelle. Nous nous constituons notre propre réalité par l’intermédiaire de notre langue d’accueil, le français. « Écrire dans une langue seconde, c’est la rendre moins seconde, moins étrangère, lui accorder, avec confiance et amour, avec exigence et labeur, le rôle de témoigner de notre existence […] Et cette langue finit par devenir une de nos réalités les plus importantes », expliquait Ying Chen à son fils. Comme lui, lorsque je suis en Chine, on me demande d’où vient l’accent québécois de mon chinois. Grâce aux écrits de Ying Chen, on comprend mieux la relation complexe qu’entretiennent certains nouveaux arrivants avec la langue française.

http://www.ledevoir.com/societe/actualites-en-societe/498000/je-me-souviens

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